Vivre le plus beau de l'humanité grâce à une tomate, des morceaux de pain, un ognon, un minuscule morceau de poisson séché et des épices? Un petit Indice, c'est dans cet esprit qu'on se souhaite tous BONNE ANNÉE.

Voir pourquoi plus bas.



Pour répondre à question, je vais vous parler de Marie-Renée,une femme extraordinaire, mère de mon amie et épouse Sandy. Le lendemain de mon arrivée à Haïti, Sandy et moi montions à nouveau la mototaxi pour une nouvelle aventure. Après presque une heure de mototaxi, je pense que j'aurais pu allumer le feu de charbon avec mon derrière brulant. Mais ça c'est une autre histoire, que vous pouvez consulter dans le billet de l'été passé, «Moto Taxi à Haïti».

Arrivée Marie-Renée, c'est comme retrouver ma maison, tellement je me suis bien accueilli. La famille était dans l'organisation d'un ballot de beaux vêtements disparates destiné à la vente. Les Haïtiens font preuvent d'ingéniosité pour vivre dans un monde où, pour un Québécois tout semble compliqué.

Cependant les différences sociétales ne sont pas le sujet de ce billet. Je débarque à l'instant de la moto avec le «cul en feu» comme on dit en bon québécois et à part embrasser et dire bonjour à ces gens que j'aime, ma seconde préoccupation est de reposer un peu cette partie de mon corps.

— Je hurlai bien fort Halleluia.

 C'est toujours le même cris de joie que je pousse quand j'arrive à destination.

Marie-Renée, Fara et la petite Tama sortirent de la maison, je les embrassai, deux baisers, un sur chaque joue. Je me sentis chez-moi bien que mes enfants me manquaient déjà, cet accueil me réconforta. Je m'installai à l'ombre, le soleil tropical mène la vie dure à ma petite peau blanche. J'avais fait la route avec un vêtement sur la tête pour ne pas brûler au soleil.



— Es-tu un jeune de 14 ans, avec ça sur la tête me dit Marie-Renée à mon arrivée.

Cette phrase : «un jeune de 14 ans» aurait bien fait rire Élyse, ma fille. Elle aurait aussitôt profité de l'occasion pour se payer ma tête, d'une de ses boutades préférées concernant mon âge mental.

— 14 ans c'est un peu dur comme constatation, j'ai plutôt l'air d'un jeune de 15 ans rétorquais-je à Marie-Renée. LOL

 Environ une heure plus tard, Marie-Renée me fit essayer des chemises et des pantalons. Ce fut Noël avant l'heure pour moi. Je reçus en cadeau toutes les chemises qui selon l'avis général «faisait un bel homme de moi», avec des belles couleurs exactement comme je les aime.

Ce matin, c'est avec tendresse que je mis une de ces belles chemises. Je la portai fièrement toute la journée en pensant à ma belle famille. Il ne manque que mes trois trésors, Élyse, Alexandre et Anne-Sophie pour que le bonheur soit total, me dis-je à moi-même à l'instant où j'enfilai la chemise.

Qu'est-ce que  toute cette histoire a à voir avec : une tomate, des morceaux de pain, un ognon, un minuscule morceau de poisson séché et des épices. C'est tout simple, c'est avec ce petit rien, que Marie-Renée cuisina une délicieuse soupe à l'ognon pour nourrir cinq personnes au déjeuner.

Je mangeai ce grand bol de soupe avec délectation.

— C'est vraiment très très bon, dis-je en français.

— En créole, dit alors immédiatement Fara, qui m'enseigne le créole, et c'est une professeure exigeante. LOL, mais c'est pour mon bien.

— «Li gou», dis-je alors avec conviction.

C'est tout ça qui rend belle la vie, tous ces moments où nous avons l'occasion de vivre ce que l'humanité a de meilleur à offrir : l'amour, l'amitié, le partage, la fraternité, l'entraide, le pardon. Je ne peux m'empêcher de penser à ce poème de Paul Éluard qui représente bien l'humanité dans ces défis et dans ce qu'elle a de plus beau.

C'est la douce loi des hommes

Du raisin ils font du vin

Du charbon ils font du feu

Des baisers ils font des hommes

C'est la dure loi des hommes

Se garder intact malgré

Les guerres et la misère

Malgré les dangers de mort

C'est la chaude loi des hommes

De changer l'eau en lumière

Le rêve en réalité

Et les ennemis en frères



Une loi vieille et nouvelle

Qui va se perfectionnant

Du fond du coeur de l'enfant

Jusqu'à la raison suprême.

Merci Marie-Renée, pour ta générosité, merci pour tous ces bons plats cuisinés avec amour qui me font connaitre la cuisine haïtienne. Merci pour cette soupe qui m'a rappelé encore une fois «La douce loi des hommes». BONNE ANNÉE!